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La "paix" impérialiste mensongère signifie la terreur sioniste (Le Bolchévik)

Le Bolchevik N°144 Automne 1997

La "paix" impérialiste mensongère signifie la terreur sioniste

Israël hors de tous les territoires occupés!
Défense du peuple palestinien!
Pour une fédération socialiste du Moyen-Orient!


15 septembre - Les événements qui ont immédiatement précédé le voyage en Israël de la Secrétaire d'Etat américaine Madeleine Albright viennent brutalement rappeler que le Proche-Orient est toujours une poudrière de massacres nationalistes et de guerres généralisées. Cela fait maintenant six semaines que le gouvernement sioniste soumet la population palestinienne des territoires occupés à un blocus de famine, qui assigne les habitants à résidence dans leurs villes et leurs villages, empêche les ouvriers de se rendre à leur travail, bloque l'approvisionnement en produits alimentaires et en produits de première nécessité. En même temps, Israël a multiplié les bombardements aériens et d'artillerie ainsi que les raids de commandos meurtriers contre le sud-Liban. Et en août, le gouvernement de droite du premier ministre du Likoud Benyamin Netanyahu a annoncé des plans pour construire un barrage sur un territoire revendiqué par son voisin syrien.

Clinton a envoyé son émissaire au Proche-Orient dans l'espoir de ressusciter le "processus de paix" mensonger parrainé par les Etats-Unis entre Israël et l'Autorité palestinienne de Yasser Arafat. Si Albright a plaidé poliment auprès de Netanyahu pour qu'il agisse de façon moins "provoquante" envers son "partenaire de la paix", elle a ordonné avec arrogance à Arafat d'être plus "impitoyable" dans la répression contre le Hamas, le Djihad islamique et d'autres "terroristes". Et effectivement, la veille de la visite d'Albright, Arafat avait ordonné la rafle policière contre des sympathisants présumés du Hamas et, l'an dernier, plus de 900 personnes avaient été arrêtées lors d'une rafle en masse.

Même si la Maison Blanche de Clinton est loin d'être satisfaite du régime israélien actuel dont les actes ouvertement provocateurs ont même suscité l'hostilité de régimes clients des Etats-Unis aussi dociles que l'Egypte et l'Arabie Saoudite, Washington continue de soutenir l'Etat sioniste à coups de milliards de dollars en armements et en crédits. Comme l'a récemment établi le journal londonien Independant (24 juin), les bombes et les missiles qui ont été utilisés l'année dernière dans l'opération israélienne "Raisins de la colère" pour bombarder le sud-Liban et chasser de chez eux un tiers de ses habitants, avaient presque tous été livrés par le Pentagone. Pendant ce temps, un représentant de la CIA sert de "médiateur" dans la collaboration entre Israël et les forces d'Arafat dans le domaine de la "sécurité", pour pourchasser les dissidents palestiniens. Nous disons: A bas la sanglante "Pax Americana" antipalestinienne - Impérialistes, bas les pattes devant le Proche-Orient!
A l'époque de la signature de l'accord Israël-OLP sur la pelouse de la Maison Blanche, en 1993, beaucoup de libéraux et de réformistes ont fait écho à l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) d'Arafat et ont salué cet accord comme un pas vers la libération nationale des Palestiniens. Au contraire, la Ligue communiste internationale a dénoncé cette "paix" de l'oppresseur, qui "n'offrait même pas l'expression la plus déformée de l'autodétermination" et qui, en revanche, "apposait le sceau de l'OLP sur l'oppression nationale des masses arabes palestiniennes opprimées depuis si longtemps" ("Accord Israël-OLP pour un ghetto palestinien", le Bolchévik n°125, novembre-décembre 1993).

Arafat homme de paille de la répression sioniste

Ces dernières années, les zones arabes de Gaza et de Cisjordanie sont de facto sous un état de siège permanent, même quand elles ne sont pas officiellement bouclées. Le dernier bouclage, imposé comme "punition collective" pour un attentat à la bombe perpétré par des islamistes à Jérusalem fin juillet, n'a fait qu'exacerber le désespoir déjà largement répandu parmi les Palestiniens. La réaction, prévisible, est arrivée la veille de la visite Albright, quand trois autres kamikazes ont fait exploser à Jérusalem dans une rue commerçante bondée, les bombes qu'ils transportaient, tuant quatre personnes en plus d'eux-mêmes.

Nous condamnons de tels actes de terreur indiscriminée, qui visent non pas les forces armées de l'Etat sioniste ou ses auxiliaires, les "colons" fascisants, mais prennent pour cibles tous les Juifs et tuent aussi des résidents arabes. De tels actes sont conformes aux vils objectifs antisémites-et anti-femmes- du Hamas, dont le but, qui est de créer un régime khomeinyste dans les territoires occupés, est le reflet de celui recherché par les réactionnaires religieux juifs fascisants qui visent à créer en Israël un régime totalement théocratique basé sur l'ancien testament.

Mais on nage en pleine hypocrisie quand les assassins terroristes de l'Etat bourgeois israélien, qui ont infiniment plus de moyens, accusent de façon hystérique Arafat de protéger des "terroristes" du Hamas et du Djihad islamique. C'est avec l'appui d'Israël que le Hamas a étendu son influence dans les années 1980, pendant lesquelles il fut délibérément encouragé pour faire contrepoids au Fatah d'Arafat et aux autres formations nationalistes laïques au sein de l'OLP et autour d'elle. Si, comme on l'affirme aujourd'hui, le Hamas bénéficie maintenant d'un soutien atteignant le tiers de la population palestinienne (y compris beaucoup d'anciens militants du Fatah), cela donne la mesure du désespoir et de la frustration auxquels les masses des territoires occupés ont été conduites par les accords de "paix" parrainés par les Etats-Unis, si l'on se rappelle que les ouvriers et l'intelligentsia palestiniens étaient jusqu'à ces dernières années parmi les plus cosmopolites du Proche-Orient.

Les mises en garde que nous avions lancées à l'époque comme quoi les accords de "paix" de 1993 mèneraient à ce que "des flics de l'OLP, armés et payés par Israël, tuent de jeunes rebelles palestiniens pour le compte des terroristes de l'Etat sioniste" ont été amplement confirmées. Le régime fantoche d'Arafat est, dans les faits, un Etat policier où les flics palestiniens remplacent les forces d'occupation israéliennes comme tortionnaires et bourreaux. Cette répression est particulièrement dirigée contre les travailleurs palestiniens. Ainsi, lorsqu'au début de cette année, les enseignants de Cisjordanie ont mené pendant deux moins la première grève ouvrière sous le régime d'Arafat, des flics palestiniens ont été envoyés pour arrêter les dirigeants syndicaux et casser la grève.

Particulièrement depuis l'élection de Netanyahu, il y a 16 mois, Israël a fait tout ce qui était en son pouvoir pour humilier et provoquer les masses palestiniennes, depuis le percement, l'année dernière, d'un tunnel sous un lieu saint à Jérusalem et le massacre de sang froid de plus de 60 manifestants arabes, jusqu'à la décision, au printemps dernier, de construire de nouveaux logements juifs dans le quartier arabe de Jérusalem Est. L'année dernière, Israël a également annulé les "autorisations de séjour" à Jérusalem de plus d'un millier de Palestiniens qui y avaient habité toute leur vie. Les réquisitions de terre et les destructions au bulldozer de maisons et de commerces arabes se sont poursuivis à un rythme effréné. L'accord tant vanté qui plaçait la ville de Hebron en Cisjordanie sous statut d'"autonomie" palestinienne a donné 20% de cette ville arabe de 100 000 habitants à plusieurs centaines de "colons" sionistes fanatiques armés jusqu'aux dents, et divisé le reste en deux ghettos palestiniens entourés de postes de contrôle militaires israéliens.

Ce genre de mesures vise à éliminer toute concentration de population arabe dans les frontières en perpétuelle expansion de "Grand Jérusalem", et à faire en sorte que l'Autorité palestinienne ne garde une souveraineté nominale que sur une poignée de cantons arabes isolés en Cisjordanie. C'était en fait le but des accords de "paix" de 1993 négociés par le précédent gouvernement israélien dirigé par les "travaillistes", parti totalement bourgeois, architecte des visées expansionnistes de l'Etat sioniste qui, en 1967, a mené la conquête des territoires occupés.

La poudrière du Proche-Orient

Erigé sur l'expulsion de centaines de milliers d'Arabes de leur domiciles et de leur patrie-d'abord en 1947-48 et à nouveau en 1967- et encerclé par des régimes arabes hostiles, Israël est depuis sa création un Etat-guarnison fortement militarisé. Cela rend la société juive israélienne très sensible à tout ce qui peut ressembler à une défaite militaire face à des forces arabes. C'est ce qui explique le tintamarre autour de la mort d'une dizaine de membres d'une unité navale israélienne d'élite, la "Flottille 13", lors d'un raid de commando au Liban début septembre.
La multiplication du nombre de tués en 15 ans d'occupation par Israël de sa "zone de sécurité" au sud-Liban a conduit, même des politiciens ultra-chauvins comme Ariel Sharon- qui a mené l'invasion du Liban en 1982 et qui a ordonné le massacre de centaines de Palestiniens désarmés dans les camps de réfugiés de Sabra et Chatila- à appeler au retrait des forces sionistes de ce pays. Nous exigeons le départ des soldats et des "colons" israéliens du sud-Liban, du plateau du Golan et de Gaza et de Cisjordanie!

Le Proche-Orient a historiquement été une poudrière pour les conflits et les guerres impérialistes, et les provocations sionistes poussent toujours davantage dans cette direction. Il n'y aura pas de paix dans cette région volatile sous le régime capitaliste. L'existence même de l'Etat sioniste repose sur l'oppression nationale du peuple palestinien. Dans la Jordanie voisine, le royaume hachémite maintient sous sa coupe une population majoritairement palestinienne, tandis que des centaines de milliers de palestiniens "apatrides" languissent depuis deux générations dans de misérables camps de réfugiés contrôlés par les bourgeoisies arabes.

La ligue communiste internationale a toujours été le défenseur conséquent des droits du peuple palestinien. Mais contrairement à la pléthore de prétendues organisations "de gauche" qui se sont mises à la remorque du nationalisme palestinien petit-bourgeois pour finir par accepter la "Pax Americana" antipalestinienne, les trotskystes luttent pour une perspective prolétarienne de classe au Proche-Orient. Il est clair que les masses palestiniennes ne peuvent pas arracher leur liberté contre l'Etat sioniste par une confrontation militaire, et encore moins en s'en remettant aux "bons offices" de l'impérialisme américain. Et les bourgeoisies et les émirats féodaux arabes, nonobstant le mythe d'une "révolution arabe" sans contenu de classe colporté par des groupes comme les pseudo-trotskystes du Secrétariat unifié dans les années 1960 et 1970, ne sont pas moins les ennemis du peuple palestinien- et de tous les travailleurs et opprimés de la région- que les assassins sionistes. Pour justifier leur suivisme derrière les bourgeoisies arabes et les nationalistes revanchistes, ces groupes "de gauche" ont tiré un trait d'égalité entre les masses de langue hébraïque et la classe dirigeante sioniste, et ont nié qu'un "peuple oppresseur" a des droits nationaux, appelant dans les faits à renverser les termes de l'oppression.

Comme Chypre, l'Irlande du Nord, Sri Lanka et l'ex-Yougoslavie - entre autres -, Israël/Palestine représentent une situation de peuples interpénétrés, c'est-à-dire dans laquelle deux ou plusieurs peuples revendiquent le même territoire. Dans de telles situations, sous le capitalisme - dans lequel le pouvoir d'Etat est nécessairement dominé par une seule nation-, le droit démocratique à l'autodétermination nationale ne peut être réalisé pour un peuple sans violer les droits nationaux de l'autre.

L'histoire récente des Balkans le confirme sans ambages, de façon tant positive que négative. Ce n'est qu'après une révolution sociale - bien que déformée dès l'origine sous la direction des staliniens de Tito- que les divers peuples slaves ont pu coexister paisiblement. D'un autre côté, la contre-révolution capitaliste qui a détruit l'Etat ouvrier déformé yougoslave a été accompagnée par un carnage nationaliste perpétré par tous les camps en conflit, chaque peuple cherchant à consolider un Etat-Nation bourgeois homogène en chassant les autres de "son" territoire par des pogromes et des transferts forcés de populations.

Cela s'est vérifié non seulement s'agissant des Serbes, plus nombreux et militairement plus puissants, qui ont été particulièrement vilipendés par la presse occidentale, mais également des Croates et des Musulmans bosniaques. En fait, l'histoire de la Bosnie est une leçon de choses sur ce qui arrive lorsque les termes de l'oppression sont renversés. Ces dernières années, quand des territoires ont changé de mains, les chauvins parmi les Musulmans bosniaques, lorsqu'ils en ont eu l'occasion, n'ont pas été moins impitoyables quand il s'est agi de terroriser et d'expulser les Serbes bosniaques que les Serbes l'avaient été en chassant les Musulmans.

Au Proche-Orient, les revendications nationales conflictuelles des masses arabes palestiniennes et de celles de langue hébraïque ne peuvent être équitablement satisfaites qu'en balayant toutes les bourgeoisies de la région. Il faut faire exploser l'Etat sioniste de l'intérieur en arrachant les travailleurs de langue hébraïque à l'emprise du chauvinisme raciste, et en les gagnant à la cause de la révolution prolétarienne en alliance avec leurs frères et soeurs de classe arabes. Des décennies de terreur d'Etat sioniste et de nationalisme meurtrier dans tous les camps ont empoisonné les rapports entre les travailleurs arabes et ceux de langue hébraïque. Mais il existe une riche histoire d'unité de classe prolétarienne dans cette région, qui montre la voie.
Les partis communistes des premières années en Irak, en Egypte et dans d'autres pays arabes avaient comme particularité de compter un nombre significatif de Juifs et d'autres minorités dans leurs rangs et dans leurs directions. Et dans les années qui précédèrent la création de l'Etat sioniste, il y eut de nombreux exemples d'unité de classe dans la Palestine sous contrôle britannique. En septembre 1945, deux ans seulement avant le début du massacre nationaliste, des centaines de grévistes arabes et juifs défilaient dans les rues de Tel Aviv aux cris de "Vive l'unité entre les ouvriers arabes et juifs " et "Les ouvriers arabes et juifs sont frères", tandis que, comme le rapportait à l'époque le quotidien de langue hébraïque Ha'aretz, " des foules entières se bousculaient des deux côtés des rues pour regarder ce spectacle extraordinaire" (cité dans Comrades and Ennemies [Camarades et ennemis], Zachary Lockman, University of California Press, 1996).

Nous luttons pour des partis trotskystes qui se réapproprieront cette histoire de lutte de classe unie, partie intégrante de la lutte pour gagner les masses ouvrières de la région-à la tête de la paysannerie et de nombreuses nationalités opprimées- au drapeau de l'internationalisme prolétarien. Pour une fédération socialiste du Proche-Orient!

-Traduit de Workers Vanguard n°674